Dans une nouvelle et monumentale biographie à paraître le 4 mai en allemand, le pape émérite Benoît XVI établit un lien entre la domination du « mariage homosexuel » et de « l’avortement » dans le monde, et le « pouvoir spirituel de l’Antichrist ». Le livre signé Peter Seewald comporte notamment des réponses adressées à la fin de 2018 par le pape émérite à l’auteur à une partie des questions que celui-ci lui avait adressées.
« Il y a cent ans », a ainsi déclaré Benoît XVI, « tout le monde aurait jugé absurde de parler de mariage homosexuel. Aujourd’hui, on est excommunié par la société si on s’y oppose. » Il en va de même pour « l’avortement et la création d’êtres humains en laboratoire », a-t-il ajouté.
« La société moderne est en plein processus de formulation d’un credo antichrétien, et si l’on s’y oppose, on est puni par la société au moyen de l’excommunication », a-t-il poursuivi. « La peur de cette puissance spirituelle de l’Antichrist est dès lors simplement plus que naturelle, et elle a vraiment besoin de l’aide des prières de tout un diocèse et de l’Eglise universelle pour lui résister. »
Ces citations ont été publiées par Maike Hickson de LifeSiteNews qui a pu obtenir un exemplaire de presse de Benedikt XVI : Ein Leben de Peter Seewald (qui a coécrit plusieurs livres avec Benoît XVI et a déjà publié un livre d’entretiens autobiographiques avec lui). Toutes les citations rapportées ici ont été traduites par mes soins à partir de son article pour LifeSite, lui-même librement traduit.
Seewald a pu avoir de nombreux échanges avec le pape Benoît ainsi qu’avec son secrétaire personnel, Mgr Georg Gänswein, en vue de la rédaction de cette biographie. C’est en annexe de la biographie proprement dite que Seewald a publié des réponses de Benoît XVI sous le titre : « Dernières questions à Benoît XVI. » Ces questions, explique l’auteur, avaient été envoyées à Benoît après « de nombreux entretiens » avec lui, à l’automne 2018. De nombreuses questions de Seewald sont restées sans réponse, mais celles auxquelles Benoît a répondu se trouvent dans cette annexe.
A la question de savoir s’il avait prévu tout ce qui allait lui arriver — au début de son pontificat, il avait demandé aux catholiques de prier pour lui afin qu’il ne se « dérobe pas devant les loups » — Benoît a déclaré que la perception qu’on peut avoir de l’ampleur des problèmes dont un pape peut « avoir peur » est beaucoup trop « petite ».Interrogé sur l’affirmation souvent répétée selon laquelle il aurait, en tant que pape, rencontré « de nombreux blocages » de la part de la Curie romaine au cours de son pontificat, le pape Benoît a répondu : « Les blocages venaient davantage de l’extérieur que de la Curie. Je ne voulais pas seulement promouvoir avant tout la purification dans le petit monde de la Curie, mais dans l’Église tout entière. » Expliquant plus avant sa pensée, il a ajouté qu’« entre-temps, les événements ont montré que la crise de la foi a aussi et surtout conduit à une crise de l’existence chrétienne. » C’est, poursuit-il, ce que le « Pape doit avoir devant les yeux. »
« Bien sûr, des événements comme “VatiLeaks” sont une gêne et ne sont pas compréhensibles pour les gens dans le monde en général ; ils sont profondément troublants. Mais la véritable menace pour l’Église et avec elle, pour l’office pétrinien, ne vient pas de ce type de choses, mais de la dictature mondiale d’idéologies apparemment humanistes », a-t-il souligné. Contredire cette dictature, explique Benoît XVI, « équivaut à l’exclusion du consensus de base de la société ».
C’est dans ce contexte que Benoît XVI a parlé de « l’Antichrist ».
L’Église catholique enseigne qu’avant le glorieux second avènement du Christ, l’Église passera par une « épreuve finale » qui « ébranlera la foi de nombreux croyants ».
« La persécution qui accompagne son pèlerinage sur terre dévoilera le “mystère de l’iniquité” sous la forme d’une tromperie religieuse apportant aux hommes une solution apparente à leurs problèmes au prix de l’apostasie de la vérité », affirme le Catéchisme de l’Église catholique.
« L’imposture religieuse suprême est celle de l’Antichrist, c’est-à-dire celle d’un pseudo-messianisme où l’homme se glorifie lui-même à la place de Dieu et de son Messie venu dans la chair », poursuit le Catéchisme.
Le vénérable archevêque américain Fulton J. Sheen, dans un sermon radiophonique de 1947, décrivit l’Antichrist comme un « grand philanthrope » qui « parlera de paix, de prospérité et d’abondance ».
« L’Antichrist ne sera pas appelé ainsi ; sinon, il n’aurait pas d’adeptes. Il ne va pas porter des collants rouges, ni vomir du soufre, ni porter un trident, ni secouer une queue fléchée comme Méphisto dans l’opéra de Faust », disait-il.
« Notre Seigneur nous dit qu’il sera tellement semblable à Lui-même, qu’il tromperait même les élus — et certainement aucun diable que nous ayons jamais vu dans les livres d’images ne pourrait tromper même les élus. Comment fera-t-il son entrée dans cette nouvelle ère pour gagner des adeptes à sa religion ? »
Fulton Sheen répondait :
Il viendra déguisé en grand humanitaire ; il parlera de paix, de prospérité et d’abondance, non pas comme des moyens de nous conduire à Dieu, mais comme des fins en soi… Il écrira des articles livrant une nouvelle idée de Dieu : un Dieu dont l’image sera en harmonie avec le mode de vie des gens.
Il incitera à la foi dans l’astrologie afin que ce ne soit plus la volonté mais les étoiles qui soient responsables de nos péchés. Il écartera la culpabilité sur le plan psychologique en la présentant comme le refoulement de la sexualité ; il fera que les hommes se sentiront couverts de honte si leurs semblables disent d’eux qu’ils ne sont pas libéraux et larges d’esprit.
Il identifiera la tolérance à l’indifférence au bien et au mal. Il encouragera toujours plus de divorces au prétexte qu’avoir un nouveau partenaire est « vital ».
Il augmentera l’amour pour l’amour et diminuera l’amour pour les personnes. Il invoquera la religion pour détruire la religion.
Il parlera même du Christ et dira qu’il était le plus grand homme qui ait jamais vécu. Sa mission, dira-t-il, sera de libérer les hommes des servitudes de la superstition et du fascisme, qu’il ne définira jamais.
Au milieu de tout son amour apparent pour l’humanité et de son discours bien huilé sur la liberté et l’égalité, il aura un grand secret qu’il ne dira à personne ; il ne croira pas en Dieu. Et parce que sa religion sera la fraternité sans la paternité de Dieu, il trompera même les élus.
Il établira une contre-église, qui singera l’Église parce que lui, le diable, est le singe de Dieu. Ce sera le corps mystique de l’Antichrist qui, à l’extérieur, ressemblera à l’Église en tant que corps mystique du Christ. Il incitera l’homme moderne, dans son besoin désespéré de Dieu, dans sa solitude et sa frustration, à avoir de plus en plus faim d’une appartenance à sa communauté qui lui offrira un but plus élargi, sans nécessité d’amendement personnel et sans aveu de culpabilité personnelle. Ce sont des jours où le diable s’est vu accorder une laisse particulièrement longue.
A cette longue citation de Mgr Fulton Sheen, Maike Hickson observe que les remarques de Benoît XVI sur la domination de l’Antichrist constituent peut-être sa plus forte condamnation de la dictature du relativisme moral et des revendications LGBT. C’est lors d’un discours prononcé en avril 2005, peu avant son élection à la papauté, que le cardinal Joseph Ratzinger avait introduit le terme de « dictature du relativisme ».
Voilà que ces termes sont de fait précisés, dans une optique eschatologique.