Simon Boivin - (Québec) Le ministre des Finances, Raymond Bachand, s'est livré mercredi à une charge à fond de train contre le Journal de Montréal et sa série d'articles «honteux» publiés cette semaine à propos de son budget.
Rarement a-t-on vu un politicien s'en prendre de façon aussi virulente au travail d'un «journaliste», en l'occurrence à un cadre de l'entreprise en lock-out. Raymond Bachand a tenu un point de presse expressément pour dénoncer le traitement qui lui a été réservé dans le quotidien montréalais, et repris par le Journal de Québec.
«Le reportage qui a été fait dans le Journal de Montréal par l'adjoint à l'éditeur [Mathieu Turbide] est indigne du poste de la personne qui signe ça et contraire à l'éthique de la profession, a dénoncé M. Bachand. [...] Un reportage qui est basé sur des analyses fausses et qui donc arrive à des conclusions qui sont fausses.»
Le grand argentier du Québec n'a tout simplement pas digéré les articles qui remettent en question l'effort du gouvernement pour revenir à l'équilibre. Sous les titres «Promesse brisée», en page frontispice, et «Trahi par les chiffres», le Journal a donné la parole à un «comptable agréé». Celui-ci contredit le ministre quant à la proportion de réduction du déficit qui incombera aux contribuables. Depuis le dépôt de son budget, M. Bachand promet que Québec fera 62 % «du chemin» en réduisant les dépenses pour revenir au déficit zéro.
Le comptable soutient principalement que le ministre a sous-évalué les revenus de TVQ à recevoir et qu'une récupération par la lutte contre l'évasion fiscale n'est pas une réduction des dépenses gouvernementales. Bref, que les contribuables devront en faire plus que ce que soutient le gouvernement.
«Il n'y a pas eu d'appel pour valider ces chiffres, déplore M. Bachand. Ce reportage s'appuie sur une personne qui se donne le titre de comptable agréé, ce qui est inexact, selon mes informations. À ce que je sache, l'Ordre des comptables est intervenu depuis ce temps.»
Les propos rapportés sont truffés «d'erreurs grossières» et coiffés de «titres injurieux», rage le ministre, qui a écrit une lettre à Pierre Karl Péladeau pour se plaindre. Le ministère des Finances est à analyser «les étapes qu'il devrait prendre», a dit M. Bachand, sans exclure les poursuites.
«Comme président d'une grande entreprise - M. Péladeau est un homme pour lequel j'ai beaucoup de respect -, je pense qu'il saura prendre les décisions qu'il doit prendre dans sa gestion de l'entreprise et par rapport aux rectifications et aux excuses qui devraient se faire, a continué le ministre des Finances du Québec. [...] Les trois premières pages d'un journal injurieuses et remplies de faussetés, comment vous réparez ce dommage-là?»
Les incidents se produisent quelques jours à peine après que Quebecor a choisi de claquer la porte du Conseil de presse, le «tribunal d'honneur» des médias québécois. Des décisions de l'organisme impliquant «les journaux de Quebecor» ont «grandement déplu» aux patrons de l'entreprise.
«Le Conseil de presse, c'est un organisme important au Québec, a commenté M. Bachand. [...] Le pouvoir de la presse, c'est important pour la démocratie. Mais c'est important qu'il y ait un standard. On est descendu en bas de ça cette semaine.» Le porte-parole de Quebecor, Serge Sasseville, n'a pas rappelé le Soleil, mercredi.
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