L'UPAC a piégé le député Guy Ouellette pour procéder à son arrestation mercredi soir. Une technique «non traditionnelle», soutient le ministre et ancien policier Robert Poëti.
Les enquêteurs ont usé de ce subterfuge mercredi lors de la perquisition au domicile de l'ex-policier et ami de M. Ouellette, Richard Despaties, dans le cadre de l'enquête sur la fuite de documents confidentiels liés à l'enquête criminelle sur Jean Charest et l'ex-collecteur de fonds libéral Marc Bibeau. Un autre policier, Stéphane Bonhomme, a été soumis à une perquisition et a été suspendu. Il est lui aussi soupçonné d'être à l'origine de la fuite.
Les enquêteurs se sont emparés du cellulaire de Richard Despaties. Ils ont envoyé un message texte à Guy Ouellette en se faisant passer pour lui. Ils ont écrit que l'ex-policier s'apprêtait à se mettre à table avec une journaliste de La Presse, mais qu'il voulait d'abord le rencontrer.
Un rendez-vous a été fixé en banlieue de Québec. Guy Ouellette a alors quitté l'hôtel du Parlement pour se rendre au lieu désigné. À son arrivée, ce sont les policiers qui l'ont accueilli. Ils l'ont arrêté, l'ont interrogé puis ont fait une perquisition à son condo de Québec.
UN PROCÉDÉ « NON TRADITIONNEL »
« C'est non traditionnel » comme façon de procéder, a commenté Robert Poëti lors d'un entretien avec La Presse. « Est-ce que c'est criminel, ce que tu viens de dire ? Je ne le sais pas, je ne sais pas, je ne crois pas. »
S'apparentant à une provocation policière (entrapment), l'envoi du message à Guy Ouellette est tout à fait légal, indiquent des sources policières. Cette intervention avait été avalisée par la Couronne, font comprendre des sources à l'UPAC.
Un tel geste est couvert par l'article 487 du Code criminel. Selon cet article, « un juge de la cour provinciale [...] peut décerner un mandat par écrit autorisant un agent de la paix, sous réserve du présent article, à utiliser un dispositif ou une technique ou une méthode d'enquête, ou à accomplir tout acte qui y est mentionné, qui constituerait sans cette autorisation une fouille, une perquisition ou une saisie abusive à l'égard d'une personne ou d'un bien ».
L'arrestation de Guy Ouellette s'est faite sans mandat, conformément à l'article 495 du Code criminel : un « agent de la paix peut arrêter sans mandat [...] une personne qui a commis un acte criminel ou qui, d'après ce qu'il croit pour des motifs raisonnables, a commis ou est sur le point de commettre un acte criminel ».
UNE ARRESTATION « NÉCESSAIRE », SELON L'UPAC
Dans un communiqué de presse laconique, l'UPAC a confirmé une arrestation sans confirmer le nom de Guy Ouellette. Cette arrestation était « nécessaire, entre autres pour sécuriser des éléments de preuve ainsi que pour empêcher que les infractions se continuent ou se répètent ». L'UPAC voulait empêcher que Guy Ouellette ne puisse plus tard détruire des preuves qui auraient pu l'incriminer.
L'équipe mixte affectée à l'enquête, formée des membres de plusieurs corps de police, a exécuté six mandats de perquisition et rencontré une dizaine d'individus mercredi, selon le communiqué.
« Les enquêteurs procéderont à l'analyse de la preuve recueillie [mercredi] avant que le dossier ne soit soumis au Directeur des poursuites criminelles et pénales qui déterminera s'il y a lieu de porter des accusations. »
- Extrait du communiqué de l'UPAC
Pour bien des libéraux, les explications de l'UPAC sont minces et permettent difficilement de comprendre les motifs de l'arrestation de M. Ouellette, qui a décidé de se retirer du caucus libéral temporairement.
« Le petit communiqué était minimal, a réagi Robert Poëti. Je n'ai pas l'information pour apporter un jugement éclairé sur ce qui s'est passé » au sujet de Guy Ouellette.
« UN CHOC »
Avant la réunion du caucus libéral en matinée, Gaétan Barrette disait souhaiter que l'UPAC explique rapidement les motifs de l'arrestation de son collègue. Le communiqué publié par l'organisation de Robert Lafrenière quelques minutes plus tard ne fait « certainement pas » la lumière sur la situation, a déploré le ministre de la Santé à sa sortie de la réunion. « Écoutez, quand on arrête quelqu'un, il doit y avoir des raisons. Alors là, on est dans les hypothèses. Je pense que le communiqué, en ce qui me concerne, n'est pas suffisamment précis », a dit M. Barrette.
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