Une victime, qui affirme avoir été abusée par le Prince Andrew, estime que l'abandon de l'enquête sur Jeffrey Epstein traduit la corruption au plus niveau du gouvernement. La police soutient que les faits ne relevaient pas de sa juridiction.
Après l'interview calamiteuse du Prince Andrew pour justifier ses relations avec le pédophile Jeffrey Epstein, l'attention se porte désormais sur la police britannique et sa décision de ne pas enquêter sur celui-ci en dépit du témoignage accablant d'une victime.
Virginia Robert Giuffre, qui affirme avoir été l'«esclave sexuelle» de Jeffrey Epstein et accuse le Prince Andrew d'avoir abusé sexuellement d'elle au début des années 2000, explique ainsi avoir contacté les autorités britanniques en 2015, sans que sa démarche ne soit suivie d'effet. «Au début, Scotland Yard m'a dit qu'ils allaient faire une perquisition à la maison de Ghislaine Maxwell à Londres. Puis soudain, tout comme le FBI, ils n'ont pas eu le droit de poursuivre leur enquête. Corruption au plus haut niveau du gouvernement», a-t-elle écrit sur Twitter.
La jeune femme dénonce ainsi ouvertement les liens hauts placés de Jeffrey Epstein, qui lui auraient permis selon elle d'éviter les poursuites pendant de nombreuses années. L'accusation n'est pas nouvelle : la journaliste Vicky Ward du Daily Beast, qui suit l'affaire depuis des années, avait déjà raconté les confidences à ce sujet, sous couvert d'anonymat, d'un ancien haut placé de la Maison Blanche. Lors de son entretien pour intégrer l'administration Trump, Alexandre Acosta, procureur de Miami en charge du procès de Jeffrey Epstein en 2007, aurait expliqué avoir passé un accord – très avantageux – avec les avocats du milliardaire, sur des ordres venus de plus haut : «On m'a dit que [Jeffrey] Epstein "appartenait au renseignement" et qu'il fallait le laisser tranquille.»
Enquête abandonnée sur les conseils du Service des poursuites judiciaires de la Couronne
Une version réfutée par la police britannique qui a réagi aux propos de Virginia Giuffre dans un communiqué de presse diffusé le 28 novembre. Confirmant avoir commencé à enquêter à la suite du témoignage de la jeune femme, la police explique avoir finalement abandonné l'affaire après avoir sollicité l'avis du Service des poursuites judiciaires de la Couronne (Crown Prosecution Service, équivalent du parquet), celui-ci estimant que cela ne relevait pas de sa juridiction.
«Les allégations sont dirigées contre un citoyen américain, Jeffrey Epstein, et une Britannique [Ghislaine Maxwell]. Cela concerne des faits en dehors du Royaume-Uni, et une allégation de trafic vers Londres en mars 2001. Nous avons donc conclu que le service de police métropolitain n'était pas l'autorité appropriée pour mener des enquêtes dans ces circonstances. Il était clair que toute enquête sur un trafic d'êtres humains serait largement orienté sur des activités et des personnalités en dehors du Royaume-Uni», soutient la police, notant que Scotland Yard avait réitéré sa position en 2019 à la suite de la mort de Jeffrey Epstein, en août dernier.
Un argument qui peut surprendre au regard de la situation de Julian Assange, citoyen australien en attente d'être extradé vers les Etats-Unis pour avoir diffusé des documents révélant les pratiques de l'armée américaine en Irak.
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