Le rappel récent dans les médias du terrible tremblement de terre survenu à Haïti le 12 janvier 2010 m’a remis en mémoire le voyage de groupe que j’avais fait dans ce pays en décembre 1985 et janvier 1986, peu avant que Duvalier fils ne soit «dessouqué» comme disaient les locaux. En visitant Port-au-Prince, Kenscoff, Barbancourt, Cap haitien, Labadier, Milot, Jacmel…en tap-tap, taxi ou barque, nous avions croisé plus d’un tonton macoute sans être inquiété le moins du monde.
Ce peuple échevelé, souriant et résilient nous fit bon accueil partout. Les enfants bien entraînés à demander l’aumône nous abordaient la main tendue par ces mots magiques pour eux : « Blanc, blanc, blanc ». Les organismes caritatifs établis sur place nous demandaient explicitement ne pas répondre à de telles sollicitations. De superbes jeunes filles s’intéressaient de près, de très près pour certains, à nos corps en sueur et en émoi autour de la piscine de notre hôtel de Port-au-Prince, tous les sens aiguisés par la chaleur, les couleurs locales, la musique et les odeurs.
Cette effervescence et cette soif de vivre rendent peut-être la misère moins pénible au soleil, mais Haïti était et demeure sans doute encore un pays aux contrastes violents. Je n’ai jamais oublié cet homme aux deux jambes coupées déambulant sur ses mains dans les détritus et la boue de Cité Soleil, ni ce grand Blanc, un français, descendu de Pétion-Ville dans sa rutilante Mercedes, qui nous avait regardé à la sauvette sans nous saluer, nous les touristes de nulle part. Duvalier parti et de retour au Canada après avoir «touristé» à fond !, la vie a continué là-bas avec tous ses aléas politiques et sociaux.
Puis le malheur a encore frappé. L’île d’Hispaniola que se partagent Haïti et la République dominicaine est située dans une zone sismiquement active et Port-au-Prince, contrairement à Saint-Domingue est assis sur une faille entre deux plaques tectoniques. Ici, j’aimerais citer un commentaire pris sur Wikipédia : « Le risque sismique était donc bien identifié, et son impact humain aurait pu être moindre si des campagnes de prévention avaient été réalisées, la population sensibilisée et les constructions sécurisées, ce qui n'a pas été le cas. Des causes humaines, liées à la pauvreté d'Haïti et la faiblesse de son gouvernement, ont ainsi renforcé la catastrophe naturelle».
Il est réconfortant aujourd’hui d’entendre la jeunesse haïtienne vouloir s’extirper (enfin !) de cette mentalité de Roger-Bontemps, d’assistés et de victimes impuissantes et d’exprimer l’urgence de faire le ménage politique qui s’impose. L’heure est peut-être venue en effet pour eux de se prendre en main sans dépendre de tout un chacun, d’être un peu moins cigale et un peu plus fourmi (Jean de La Fontaine) en rappelant cette devise singulière : « Aide-toi et le ciel t’aidera».
Yvonnick Roy
Québec
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