Le Québec échappe à la récession, titraient les journaux de fin de semaine en rapportant les données publiées vendredi par l'Institut de la statistique. Pour être exact, il aurait fallu lire «échappait» puisqu'il s'agit des résultats du trimestre clos en juin dernier, soit quelques mois avant la crise financière américaine. Est-il encore possible de faire durer le beau temps?
En lisant les résultats du printemps dernier, on constate que c'est surtout grâce aux consommateurs et aux gouvernements si le Québec a gardé la tête hors de l'eau au cours du printemps dernier. Quand on sait que les dépenses des ménages, qui comptent pour 65 % du PIB, n'ont crû que de 0,7 % en termes réels, on comprend que le résultat global ait été si faible à 0,9 % en rythme annuel. Sans un taux de chômage très bas, un niveau de confiance étonnamment élevé et les riches programmes d'infrastructures des gouvernements, il est probable que le Québec aurait connu la récession.
Ces brèves remarques permettent de comprendre que les prochains mois seront bien différents. D'ores et déjà, la crise financière américaine très médiatisée fait souffler un vent de méfiance, parfois même de panique sur la scène canadienne.
Les cycles sont chose normale en économie de marché. Ce qui l'est moins cette fois, c'est que le ralentissement en cours est aggravé par la crise financière la plus profonde que nous ayons connue depuis les années trente. Il est donc à prévoir qu'au lieu de diminuer, comme c'est le cas en période de ralentissement, les taux d'intérêt et les conditions de crédit risquent de rendre l'accès aux capitaux plus difficile pour les entreprises et pour les ménages.
Chômage à la hausse, épargne nulle, endettement élevé, consommation et investissements à la baisse... il ne reste plus que l'État pour jouer son rôle classique de régulateur de l'activité économique. Pour autant, bien sûr, que les gouvernements acceptent cette responsabilité.
De façon prémonitoire, Québec investit cette année 7,6 milliards dans les infrastructures. Il faut maintenir ce rythme l'an prochain même si les revenus fiscaux ne sont pas au rendez-vous.
Du côté d'Ottawa, libéraux et conservateurs promettent de garder le cap sur l'équilibre budgétaire. Or, si le prix du pétrole diminue au moment même où l'activité manufacturière ralentit, le chômage augmentera et les revenus fiscaux diminueront. La tentation sera forte de lancer une nouvelle série de compressions au pire moment du cycle économique.
Il est trop tôt pour crier au loup, et on peut souhaiter qu'il ne soit pas nécessaire d'en arriver là. Mais il vaut mieux s'y préparer mentalement, car il serait ridicule de faire un dogme du budget équilibré si la situation économique requiert l'injection rapide de fonds pour relancer la machine.
Grâce à la discipline budgétaire que Canadiens et Québécois se sont imposée depuis treize ans, nous avons retrouvé la marge de manoeuvre indispensable à une intervention stratégique en cas de crise. N'oublions pas qu'il suffirait d'une chute de 1 % ou 2 % du PIB pendant quelques trimestres seulement pour faire grimper le chômage à des taux de plus de 10 % au Québec, puis au moins cinq ou six ans de reprise économique pour récupérer le terrain perdu. C'est là le pire scénario imaginable, celui que nous avons connu deux fois en moins de vingt ans et que personne ne veut revivre.
L'économie au Québec
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