M. Labrie.
Si une chose est certaine, c’est qu’Obama et le Dalaï-Lama ne défendent ni les mêmes principes ni ne poursuivent les mêmes buts que les nationalistes. Excusez-moi de vous le dire aussi abruptement, mais vous êtes complètement « dans le champ ».
La préservation des traditions religieuses, culturelles et linguistiques, tout autant que la protection des droits de la personne ou de la langue sont les derniers des soucis d’un Obama. Guerres, conquêtes et dépossession sont les attentes des États-Unis alors que paix, reconnaissance de leur droit et reprise de possession de leur pays sont celles des Tibétains. Le redoublement de violence, de mensonge et de forfaiture est le fin mot des politiques étasuniennes. Exploitation des ressources de la planète, dislocation des états souverains, assassinats politiques, mise en place de pions au service de l’empire et manipulation de l’opinion publique sont leurs outils très efficaces de désinformation, de duperie et de tromperie. Seuls comptent le pouvoir et l’exercice de ce dernier même au prix de la misère humaine, des tueries injustifiées tout autant qu’injustifiables, de la pauvreté et de l’appauvrissement des peuples dont ils convoitent les ressources. Sans parler des misères que subit leur propre peuple.
L’appui inconditionnel au Dalaï-Lama ne sert que leurs intérêts géopolitiques face à une Chine de plus en plus envahissante et qui ne cherche qu’à élargir ses réseaux d’influence sur tous les continents.
Offrir un appui inconditionnel en réaffirmant les trois grands principes que sont la langue, la culture et les traditions religieuses n’est que poudre aux yeux, les Américains n’ayant jamais respecté que la poursuite de leurs propres intérêts dans le mépris le plus absolu des valeurs d’autrui.
Pour ce qui est du Tibet et du Québec, il faut être complètement déconnecté pour faire le moindre rapprochement entre nos deux nations. Le Tibet a été envahi par la Chine au début des années 1950 et leur décision d’en annexer le territoire visait l’appropriation des terres, des ressources minières, de sa situation stratégique et du pouvoir qu’ils pouvaient en tirer sur l’ensemble de l’Asie. Pour arriver à leurs fins, ils ont depuis ce temps détruit plus de 6000 temples, éliminé 1,500,000 Tibétains, fait disparaître des lieux traditionnels sacrés situés en haute altitude dont les temples et les lacs sacrés étaient au cœur des traditions spirituelles tibétaines. Des saccages continuent d’être perpétrés et nombre de lacs aux eaux cristallines sont devenus de véritables dépotoirs pour déchets radioactifs. L’envahissement de colons chinois et l’accent mis sur l’apprentissage de leur langue pour tous les Tibétains n’ont cessé de progresser depuis plus de cinquante ans, et la maltraitance des Tibétains qui tentent de lutter pour leur survie et celle de leurs traditions participe d’un génocide qui se poursuivra jusqu’à l’extinction pure et simple de ce peuple fier, courageux et pacifique.
En 1956, le Dalaï–Lama écrivait :
“[…On me remit un exemplaire d’un journal publié par les autorités chinoises è Karze, dans la région de Kham. J’y découvris, incrédule, une photographie qui montrait une rangée de têtes coupées. La légende expliquait que ces têtes avaient appartenu à des « criminels réactionnaires ». C’était la première fois que j’avais sous les yeux la preuve concrète des atrocités chinoises. Désormais, je savais que tout ce que j’avais entendu dire au sujet de nos nouveaux maîtres était vrai… Je commençais à me demander s’il restait quelque espoir. La prophétie de mon prédécesseur commençait à se vérifier de manière plus précise.]”
Le 9 mai 1959, lors d’un discours devant le parlement indien, le président Nehru déclarait :
“[…Nous assistons ici à quelque chose d’étrange, une société qui a vécu complètement isolée pendant des siècles et qui surgit soudain à l’air libre, et que les événements projettent dans ce monde fou qui est le nôtre, avec ses guerres froides et tout ce qui se passe de nos jours… Imaginez le contraste entre ces deux mondes. Il y a entre eux un océan infranchissable. Il est inévitable que des conséquences douloureuses en découlent. Cela ne peut être évité par de simples vœux pieux.]”
Pour Obama, la culture de son image de « prix Nobel de la paix » qui n’a cessé de faire la guerre depuis qu’il est au pouvoir, prime de façon pour le moins éclatante sur le soutien des idées libératrices qui animent les nationalistes, quelque soient les pays dont on parle. Prétendre que les États-Unis sont le pays de la démocratie tient, quant à moi, du pur angélisme.
Il n’y a aucun parallèle qui puisse être été évoqué quant à la situation du Tibet et celle du Québec en terme de « tibétisation ». Le Tibet est un territoire occupé depuis plus de soixante ans par une nation hostile à sa culture et à ses valeurs et qui fera tout pour éradiquer jusqu’à l’extinction, un peuple riche d’une grande histoire et porteur d’une philosophie et d’un art de vivre basés sur la compassion et la non-violence. Rien à voir avec ce que se passe au Québec. Pour nous, tous les espoirs sont permis et je ne doute pas que notre langue et notre culture soient des éléments importants de notre désir de libération, cependant que notre « tradition religieuse catholique » (sic) n’en soit certainement pas un des fondements. Depuis la Révolution tranquille, bien des choses ont changées à cet égard.
L’espoir nourrit bien davantage que les rêves, il est aussi et surtout un tremplin pour l’action.