C’est par une majorité de trois voix sur 36 que le projet de cimetière musulman dans la municipalité de Saint-Apollinaire a été rejeté, dimanche, par référendum. Les musulmans de la région de Québec, contrairement aux catholiques, aux protestants et aux juifs, n’ont toujours pas de cimetière à eux pour enterrer leurs morts, une situation déplorable.
Le projet était mené par le Centre culturel islamique de Québec (CCIQ), la grande mosquée de Québec où Alexandre Bissonnette a commis son attentat qui a fait six victimes. Le directeur du complexe funéraire Harmonia, de Saint-Apollinaire, a fait une offre à la mosquée pour lui vendre un terrain afin qu’on puisse y établir le premier cimetière musulman de la région de Québec. Comme le zonage qui régit Harmonia se limite à l’enterrement de cendres, un changement de zonage était nécessaire pour qu’on puisse y ensevelir des corps.
Favorable au projet, le maire de la municipalité, Bernard Ouellet, était convaincu qu’une majorité des 6000 Apollinairois l’était aussi. Les opposants au projet ont toutefois réussi à recueillir suffisamment de signatures pour forcer la tenue d’un référendum dans lequel seuls les citoyens résidant à proximité du futur cimetière étaient appelés à se prononcer. En tout, 49 personnes avaient le droit de vote et 36 s’en sont prévalues.
S’il y a une chose que montre cet exercice supposément démocratique, c’est que les tares qu’avait relevées Jean-Paul L’Allier dans un rapport sur les référendums municipaux sont bel et bien réelles. L’ex-maire de Québec recommandait qu’ils soient abolis parce qu’ils consacraient, à ses yeux, la primauté d’intérêts particuliers à l’intérêt général.
Dans le cas présent, les opposants ne pouvaient invoquer sérieusement le fait que le projet représentât une nuisance et qu’ils subiraient des inconvénients. Il ne s’agissait pas de construire à l’arrière de la cour de leurs bungalows une usine polluante et bruyante ou un immeuble en hauteur. N’y a-t-il rien de plus calme qu’un cimetière et de plus discret que le bruit des pissenlits que l’on mange par la racine ?
La porte-parole des opposants, réunis dans le Comité de l’alternative citoyenne, Sunny Létourneau, s’est bien gardée de reprendre les propos carrément xénophobes qu’une minorité de citoyens a proférés en mars lors d’une assemblée publique. On apprend qu’elle est membre du clan 12, en Chaudière-Appalaches, de La Meute, qui milite contre l’islamisme, un groupe que d’aucuns qualifient d’extrême droite, mais qui rejette cette étiquette.
Faisant preuve d’une certaine maîtrise des relations publiques, Mme Létourneau a soutenu que ses concitoyens ne s’opposaient pas à l’inhumation de musulmans sur le territoire de leur municipalité, mais qu’ils souhaitaient que le cimetière ne soit pas réservé à une seule confession. Dans un bel esprit du « vivre-ensemble ».
La porte-parole s’appuie sur l’exemple d’un cimetière, à Saint-Augustin-de-Desmaures en banlieue de Québec, qui vient d’inaugurer un carré pour l’inhumation de musulmans. Il s’agit d’un cimetière exploité par l’entreprise funéraire Lépine Cloutier. En outre, Mme Létourneau a avancé quelques arguments pratiques, notamment le fait qu’un cimetière appartenant à une communauté religieuse, contrairement à une entreprise privée, ne paie pas de taxes municipales, contrairement à l’entreprise privée, et que l’entreprise Harmonia ne possède pas d’expertise dans l’inhumation des corps.
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