Décidément, les néoconservateurs sont pleins de morgue. Depuis la défaite des républicains aux législatives, ils expriment avec plus de force que dans les semaines antérieures au scrutin leur dédain pour leur ex-champion, George W. Bush. Par l'entremise de leurs chroniques radiophoniques, ce boulevard médiatique que le magnat Rupert Murdoch leur alloue (on pense évidemment à la chaîne Fox), sans oublier leurs revues comme Weekly Standard, propriété du même Murdoch, ces idéologues tirent à boulets rouges sur l'actuel locataire de la Maison-Blanche. Ce faisant, ils s'affichent comme des fanatiques et non pour ce qu'ils prétendent être: des intellectuels.
Dans la dernière livraison de Vanity Fair, Richard Perle, le bien nommé «prince des ténèbres», David Frum, l'auteur de l'«axe du mal», Kenneth Adelman, qui avait prédit que la campagne en Irak serait du «gâteau», Frank Gaffney, le dur des durs, et plusieurs autres ont uni leurs voix pour former une chorale qui entonne un hymne sur l'incompétence de Bush. Eux, évidemment, n'étant coupables de rien du tout.
Qu'on y songe bien: les membres de cet aréopage de jusqu'au-boutistes ont été nommés aux postes clés par le vice-président Dick Cheney lors de la période de transition entre Clinton et Bush, donc en l'an 2000. Ils ont mis à profit leurs positions pour réaliser leur ambition première: faire la guerre à l'Irak. Ce sont eux en effet qui, au lendemain du 11-Septembre, ont convaincu Bush de partir à l'assaut de Bagdad. C'est un autre de leurs champions, Donald Rumsfeld, qui a opté pour un contingent de taille moyenne, contrairement à l'avis de Colin Powell, qui poussait pour que rien ne soit fait tant et aussi longtemps qu'on ne disposerait pas d'une coalition militaire imposante et qu'on n'aurait pas réalisé une planification méticuleuse de la paix. Mais...
Mais si, aujourd'hui, on ne peut plus escompter une victoire en Irak et l'expansion de la démocratie que celle-ci aurait favorisée, c'est à cause de Bush. En effet, selon eux, eux qui l'ont fréquenté pendant des années, eux qui ont hérité d'immenses pouvoirs décisionnels, Bush est un incompétent, voire un idiot, si on entend bien ce que dit implicitement Frum, l'ex-rédacteur des discours du président. Et alors? D'après Frum, le chef de l'exécutif se contente de prononcer les mots que d'autres écrivent pour lui mais ne va pas jusqu'à absorber les idées que cela induit.
De tout ce fatras, on retiendra la perle des perles de l'année 2006. Elle porte la marque de l'inénarrable Perle. Ex-président du Foreign Policy Board, dont le mandat consiste justement à conseiller les présidents des États-Unis, Perle confie qu'il n'avait jamais envisagé que la guerre en Irak serait aussi... brutale. On répète: monsieur ne pensait pas que ce serait aussi sanglant. Comme si, à notre époque, on menait la bataille au fleuret moucheté. Comme si nous étions encore à l'ère où un de ces vicomtes parachuté général s'écriait: «Messieurs les Anglais, tirez les premiers.» Et dire que Perle et consorts sont à l'origine de la guerre préventive. Lamentable!
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