La sacoche remisée

MJF - démission



Quelque chose cloche derrière le départ de Monique Jérôme-Forget. Et comme il faut deviner puisque personne n'a ébruité les dessous de cette histoire, gageons que cela a beaucoup à voir avec la Caisse de dépôt et placement du Québec et pour se couvrir, quelques autres dossiers qui referont bien surface un jour comme ils ont l'heur de faire en politique...
Quatre mois jour pour jour après l'élection d'un nouveau gouvernement libéral, voilà qu'un de ses piliers quitte le navire. Titulaire du portefeuille des Finances, le plus important au cabinet, MmeJérôme-Forget a remis sa lettre de démission dans les heures qui ont suivi le vote sur son budget. Elle qui venait à peine d'être réélue pour un mandat majoritaire de quatre ans, quitte donc subitement. Dans les couloirs politiques de l'Assemblée nationale, tous savaient bien que «la ministre à la sacoche» quitterait plus tôt que plus tard. Dans une chronique publiée pas plus tard qu'hier (!) dans le quotidien LeDroit («Début de fin de régime?», Vincent Marissal revenait sur les rumeurs de départ à Québec. Celui de Jean Charest, qui attend vraisemblablement la fin de la tempête économique pour passer à autre chose, et celui de MmeJérôme-Forget.

Les quatre derniers mois ont été éprouvants pour Monique Jérôme-Forget. Prise de court par le déclenchement des élections par son chef, elle n'aura pas voulu quitter le bateau subitement. Maintenant que nous avons le bénéfice du temps qui passe, il est clair qu'elle aurait dû le faire à ce moment-là. Elle était encore en pleine gloire, auteure de trois budgets positifs, sans grosse tache à son dossier. Ce que le portrait a changé en 150 jours! Elle laisse le Québec dans un profond déficit dont il faudra trois ans pour s'en remettre, selon ses calculs. Elle a hérité d'un déficit record à la Caisse de dépôt - 39,8 milliards, rappelons-le - et un processus nébuleux et contesté de succession qui a vu Michael Sabia hériter du poste de président-directeur général. Ça noircit un curriculum vitae, de telles réalisations!
De toute évidence, MmeJérôme-Forget a précipité son départ. Elle aurait pu rester en place encore quelques mois, mais elle a choisi de ne pas le faire. Une telle décision ne se prend pas sans raison. C'est parce que les prochains mois ne seront pas de tout repos pour les libéraux et le choix de M.Sabia a peut-être été la goutte qui a fait déborder le vase. Tant qu'à partir, pourquoi ne pas le faire plus tôt que tard, si son patron, le premier ministre Jean Charest, a démontré si peu d'égard pour son opinion dans le dossier de la succession à la Caisse de dépôt? Cela après lui avoir retiré ses responsabilités au Conseil du Trésor, au sein du nouveau cabinet?
En quittant tout de suite plutôt qu'en mai ou en juin, la ministre s'évite le mal de tête que représente l'étude des crédits - mais bonne joueuse, elle se rend quand même disponible pour l'étude en comité de la Caisse de dépôt - et met dans l'embarras M.Charest qui ne l'aura pas traité avec tout l'égard que l'on doit normalement à ses tenors. Rien de tout cela ne paraît tout de suite. Ça paraît même bien que cette grand-mère quitte à quelques jours de Pâques pour passer plus de temps avec sa famille!
Au cabinet depuis l'élection du premier gouvernement Charest, en 2003, Monique Jérôme-Forget s'est fait la championne des partenariats publics-privés dès son élection. Le concept était encore relativement nouveau au Québec et l'enthousiasme de la naïveté régnait encore. Maintenant que les années ont passé et que les contribuables constatent que l'histoire des fameux PPP comporte autant de tristes chapitres que de réussites, tout le monde en est moins friand (sauf à Gatineau, où les nouvelles se sont peut-être rendues moins vite et où la Ville s'est entendue avec le club de hockey junior pour la réfection de l'aréna Robert-Guertin). MmeJérôme-Forget en parle moins aussi. Elle a aussi voulu piloter la «réingénierie» de l'État québécois: à distance, ça ne paraît pas trop.
Finalement, on se souviendra d'elle pour deux ou trois choses, ce qui n'est pas si négatif que ç'en a l'air. Elle a instauré un règlement sur l'équité salariale en 2006 à la faveur de 360000 femmes employées par les secteurs publics et parapublics du Québec, une affaire de 1,9 milliard. Elle a été courageuse dans la tempête, ne craignant jamais d'affronter les éléments, l'opposition et les médias. Et que dire de son franc-parler, sa sacoche et son syndrome de la pépine...


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