Lorsque je me promène dans les rues de Montréal et que je rencontre un Chinois, je suis conscient que cet individu à toutes les raisons valables pour être fier de ses origines. Je n’ai pas besoin de décrire ici, la civilisation chinoise.

De plus, lorsqu’il me parle en Anglais, je peux comprendre pourquoi il a choisit d’apprendre cette langue. C’est la langue d’un empire mondial qui, à une certaine époque, a imposé sa volonté partout, jusque dans son lointain pays.

J’ajoute tout de suite qu’il est d’autant plus difficile pour lui de ne pas choisir de parler la langue majoritaire du pays où il habite, s’il ne veut pas être limité à 1/10e du territoire. Cela devient donc difficile pour moi de le lui reprocher honnêtement.

Lorsque je rencontre un Grec, je suis face, encore une fois, à un individu qui possède de fichues bonnes raisons d’être fier de ses origines; et c’est la même chose pour les Italiens, les Espagnols et plusieurs autres ethnies.

Quant à la question du choix de leur langue à adopter, le problème est identique à celui de mon Chinois. La majorité des Canadiens parlent Anglais qui est l’une des deux langues officielles du pays.

Puis-je me permettre de les obliger à parler Français en leur imposant une loi? Je peux le faire évidemment; mais même les Anglais, lors de la conquête, ne l'ont pas fait. Cela me ferait une belle jambe; non?

Mais ces Canadiens-anglais; ont-ils raison d’être fier de leur origine?

Je crois que oui puisqu’ils sont issus de l’empire britannique et qu’ils ont fait de grandes choses dans l'histoire. Mais personnellement, je ne pourrais pas en être fier car je connais les raisons derrière cet empire britannique.

Je sais que l’île de Grande Bretagne fut victime de quatre vagues d’envahisseurs successifs qui se sont échelonnés sur une période d’un millier d’années et qui, à chacune des occasions, reléguait l’envahisseur précédant au rang d’individu de dernière classe.

De plus, ces quatre envahisseurs furent tous des populations qui vivaient de rapines. Les Anglos saxons, ne purent pas faire autrement pour survivre sur leur petite île que de continuer à vivre de rapines et de pillages. C’est ce qui a fini par créer l’Empire britannique.

Avec de telles origines, il n’est pas surprenant que la principale question d’un Anglo-saxon, pour établir une valeur personnelle, soit : « How much is your bank account? »
À l’époque des Vikings c’était : « Tu rapporte quoi dans ton drakkar? »

Voyons maintenant; est-ce que les français peuvent être fiers de leur origine? C’est quasi indiscutable suite à l’histoire de France. On n’a qu’à penser à l’époque du roi Soleil Louis XIV pour être fixé. Et si cela ne suffit pas un se raccroche à l’empire de Napoléon.

Par contre, si on recule dans l’histoire, personnellement, je suis plus impressionné par la fierté du Gaulois Vercingétorix dans sa défaite que par la sournoiserie du Francs Clovis à Soissons.

Toutes ces nationalités, lorsqu’elles s’expriment, apportent un poids historique à leur voix, qu’on le veuille ou non, qu’on en soit conscient ou pas.

Mais qu’en est-il pour moi?

Lorsque je retourne chez moi et que je m’arrête devant un miroir, je ne peux m’empêcher de me demander si j’ai des raisons, équivalentes à celles de tous ceux que j’ai rencontré, d’être fier de mes origines.

Quel est le poids historique de mes paroles, lorsque j’exprime mon opinion?

Puis-je être fier de me dire d’origine française quand la France a toujours voulu se débarrasser du pays que mes ancêtres ont choisit?

Puis-je être fier du fait que la France a toujours vu le Canada, mon pays, comme étant simplement un territoire à être loué à des amis du roi, pour faire le commerce des fourrures?

Puis-je être fier d’être reconnu comme un Canadien-français que la France a laissé tombé après la guerre, lorsqu’elle en a eut le choix, au profit de récupérer ses îles aux plantations de sucre?

Vous conviendrez qu’il devient difficile d’accrocher sa fierté à une telle origine.

Il ne me reste donc qu’à identifier mon origine à celle de ces ancêtres venus s’établir au Canada.

Reste à déterminer si je peux me permettre d’en être fier.

Si je me fie à ce que l’on m’a apprit sur les Canadiens-français, je suis issu d’un peuple qui a perdu son pays lorsque des Anglais se sont attaqués aux défenseurs de Québec.

Sur ces plaines d’Abraham, mon « peuple » est tombé après quinze minutes de combats; paraît-il.

L’année suivante, Montréal s’est rendu sans avoir tiré un seul coup de feu.

Par la suite, on m’a informé que mes ancêtres étaient des « porteurs d’eau » au service des Anglais et qu’ils étaient nés pour un « p’tit pain ».

Je me demande bien comment je pourrais convaincre un Chinois d’adopter la langue d’un tel « peuple » et de s’installer dans ma province en lui inculquant la fierté de devenir « Québécois »?

Puis-je lui en vouloir de préférer être un Canadien de langue anglaise au Québec?

Mais d’où vient cette « histoire » qui veut que mes ancêtres aient perdu leur pays dans une escarmouche insignifiante?

Comment se fait-il que durant la guerre de sept ans, mon peuple fut vainqueur pendant cinq ans et qu’il perdit tout, la sixième année, dans un combat insignifiant de quinze minutes?

En parallèle, comment se fait-il que la Nouvelle Angleterre n’a jamais réussi à vaincre les Canadiens comme elle l’a fait à plusieurs reprises en Acadie?

Il y a certainement des choses qui m’ont été cachées; car je ressens bien, en moi, l’impossibilité d’être issu d’un peuple abjectement soumis, sans caractère ni courage. Je ne suis pas ce genre d’individus et mes racines ne peuvent pas être issues de ce genre de terreau.

Je dois revoir l’histoire de mes ancêtres et découvrir ce qui m’a été caché.
…
Et c’est ce que j’ai fait.