Droits et Démocratie - Cirque au comité

Droits et Démocratie - KAIROS - Développement et Paix


Quand les conservateurs de Stephen Harper sont dans l'embarras, tous les moyens sont bons pour sauver la face, notamment en abusant jusqu'au ridicule des procédés parlementaires. On en verra une autre facette demain, alors que le député conservateur Jim Abbott reprendra son discours là où il l'avait laissé jeudi dernier.
Le Comité des affaires étrangères des Communes veut se pencher, avec raison, sur la crise à Droits et Démocratie. Une liste de témoins à rencontrer doit être établie, et la veuve de Rémy Beauregard, le président de l'organisme qui est décédé d'une crise cardiaque en plein coeur de la tourmente, a demandé d'en faire partie. Les trois partis d'opposition sont d'accord pour la recevoir, mais les conservateurs refusent mordicus, sous le fallacieux prétexte que le témoignage Mme Suzanne Trépanier n'apporterait qu'une «réaction émotive».
On peut plutôt croire que son propos, qui s'annonce fort pertinent selon la lettre qu'elle a envoyée pour comparaître, leur fait peur. Après tout, ils ne veulent pas plus entendre les trois employés de Droits et Démocratie congédiés par les nouveaux dirigeants. Mais ils tiennent à entendre ces derniers, à l'origine de la crise. Comme équilibre des points de vue, on aura déjà vu mieux.
Les conservateurs étant minoritaires, il leur fallait bien trouver une façon de bloquer l'opposition. Ce fut fait jeudi, alors que le député Abbott a empêché la tenue d'un vote sur la participation de Mme Trépanier en prenant la parole jusqu'à la fin de la réunion du comité. Pendant une heure, sans discontinuer, il a causé CBC, réglementation bancaire, Exportation et développement Canada... Et il a prévenu que ce serait son tour de reprendre la parole lors de la prochaine rencontre.
On s'apprête donc à revivre le cirque du Comité parlementaire de la procédure qui, il y a deux ans, devait discuter du remboursement de dépenses électorales issues de la technique dite de l'in and out. Les conservateurs avaient réussi pendant des semaines à bloquer les travaux en parlant sans arrêt. Le député conservateur Tom Lukiwski s'était même équipé de quelque 2000 pages à lire à haute voix!
Notre système parlementaire a beau permettre ces tactiques, elles restent inacceptables. L'opposition a bien raison de crier à l'abus de pouvoir. Car faire dérailler les comités, railler l'opposition aux Communes, se jouer des règles est devenu la marque du gouvernement Harper.
La crise à Droits et Démocratie soulève pourtant des enjeux fondamentaux d'ingérence gouvernementale, d'orientations politiques et de procès d'intention (les nouveaux dirigeants de l'organisme reprochent même à M. Beauregard d'avoir cherché appui auprès de ses employés, qui le lui ont donné, quand il a été aux prises avec le nouveau conseil d'administration).
Dans une entrevue récente au Globe and Mail, le député Abbott souhaitait que les députés soient plus respectueux les uns envers les autres, que le public retrouve du respect pour les élus et que ceux-ci puissent débattre de manière responsable... Il a une belle occasion de passer lui-même à l'action demain en refusant de jouer au clown en mission commandée.
***
jboileau@ledevoir.ca


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé

-->