Maria Mourani, une chroniqueuse prorusse
4 octobre 2024
Mme Mourani aurait intérêt à lire cette libre opinion parue dans « Le Devoir » du 4 octobre 2024 :
Enfin l’espoir d’un changement au Liban!
Jonathan Elkhoury
L’auteur est conférencier, chroniqueur et conseiller en diplomatie publique. Issu d’une famille chrétienne libanaise, il s’est installé en Israël en 2001.
Libre opinion
En tant que Libanais, je considère la mort du chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, comme un des jours les plus heureux de l’histoire de mon pays. En tant qu’habitant du Moyen-Orient et être humain qui a la paix à coeur, j’y vois un jour transformateur.
Depuis un moment, j’observe que plusieurs voix au Québec cherchent à blâmer Israël pour l’assassinat de Nasrallah et la décapitation de l’équipe dirigeante du Hezbollah. J’aime le Québec pour l’avoir visité et y avoir donné des conférences à de multiples reprises. Je souhaite néanmoins remettre les pendules à l’heure : Nasrallah et son organisation terrorisent le peuple libanais depuis les années 1980. Ils ont été les responsables de l’effondrement continu de mon pays ainsi que de l’oppression de mon peuple.
Ma famille en a fait les frais. Chrétienne du Sud-Liban, ma famille s’est positionnée contre l’emprise du Hezbollah en travaillant avec Israël pour obtenir la paix entre les deux pays, comme cela a failli se produire le 17 mai 1983, avant que l’accord ne soit annulé par le gouvernement libanais en mars 1984.
C’est Nasrallah lui-même qui, sur le podium, quelques jours avant le retrait de l’armée israélienne du sud du Liban, en mai 2000, a déclaré que quiconque coopérait avec Israël serait persécuté. Trois options se présentaient à nous.
La première était de « nous rendre aux autorités libanaises » pour ensuite connaître un sort funeste entre les mains du Hezbollah. La seconde était de fuir vers Israël. La troisième était, pour reprendre les mots de Nasrallah, de finir « assassinés en serrant [notre] mère dans [nos] bras ». Nous avons choisi la seconde.
La vie au Sud-Liban et au Liban dans son ensemble a changé en un clin d’oeil. Les membres du Hezbollah ont opprimé l’opposition et imposé un mode de vie. Et ils ne se sont pas limités au sud du pays.
Nasrallah est également responsable du massacre d’enfants, de femmes et d’hommes ailleurs au Moyen-Orient. Il faut rappeler qu’en plus d’être l’instrument du régime des mollahs iraniens, le Hezbollah est un allié clé du régime de Bachar al-Assad, en Syrie, depuis le début de la guerre civile en 2011. Le groupe soutenu par l’Iran a aidé les forces d’al-Assad à reprendre le contrôle de plusieurs provinces syriennes cruciales, dont Alep, et a aidé ce dernier à maintenir son emprise sur le pouvoir malgré l’opposition interne.
Nasrallah, c’est aussi la tragédie de Madaya. Beaucoup trop de Syriens se souviennent des crimes de son organisation. Par respect pour toutes ces victimes, évitons de le présenter sous une lumière faussement neutre pour maquiller sa barbarie.
Le Hezbollah a dégradé la situation au Liban jusqu’à la rendre encore pire que celle qui prévalait pendant la guerre civile des années 1970. La mort de Nasrallah est une libération pour tous les Libanais qui veulent voir leur patrie prospérer, libérée du contrôle de son organisation et de ses maîtres à Téhéran.
Je comprends qu’il soit normal de vouloir que les attaques israéliennes cessent. Mais comment ne pas souhaiter, en tant que Libanais, que son assassinat permette un réel changement dans l’équilibre des pouvoirs au pays ?
La situation au Liban après l’élimination de Nasrallah pourrait radicalement changer. On craint un soulèvement des partisans du Hezbollah contre les secteurs qui se sont publiquement opposés à leur organisation ces dernières années. L’armée libanaise n’est toujours pas en mesure d’exercer un contrôle total du pays et ses capacités militaires sont inférieures à celles du Hezbollah, même aujourd’hui alors qu’il contrôle la région du sud du Liban, la plaine de la Bekaa et certaines zones de Beyrouth.
Alors qu’Israël vient d’entamer une opération limitée dans le sud du pays, le vide laissé par Nasrallah sera bientôt comblé. Mais par qui ?
Il est certain qu’il ne doit pas l’être par les successeurs de Nasrallah ou d’autres groupes qui auraient intérêt à entretenir une flambée bientôt incontrôlable. Ce vide, il doit être comblé par ceux qui ont à coeur le Liban et la force de sa nation.
Le pays du cèdre mérite au minimum cela.