Québec -- L'Action démocratique du Québec a mis la table hier pour voter contre le budget que déposera aujourd'hui la ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget, tandis que le Parti québécois a déroulé le tapis pour se permettre de l'appuyer sans s'abîmer les genoux. Même avec les baisses d'impôt massives auxquelles tient mordicus le premier ministre Jean Charest et contre lesquelles s'élèvent les deux partis d'opposition, ce ne sera pas ce budget qui concourra à faire tomber le gouvernement libéral minoritaire.
Le critique de l'opposition officielle en matière de finances, Gilles Taillon, a présenté quatre «exigences formelles» dont dépend l'appui de l'ADQ au budget. Mais déjà, M. Taillon estime qu'il sera «extrêmement difficile» de concilier ces exigences avec les baisses d'impôt de 950 millions promises par Jean Charest en pleine campagne électorale.
L'opposition officielle réclame que le budget présente un véritable équilibre budgétaire alors que l'impasse prévue dans le budget Audet de février s'établissait à un milliard en 2008-09. «Ce budget-là doit stopper l'augmentation de la dette», estime l'ancien président du Conseil du patronat du Québec (CPQ), qui a eu le loisir de commenter, à ce titre, nombre de budgets du Québec.
Le dernier budget Audet fait grimper la dette de 117 à 124 milliards, soit de sept milliards en deux ans. «C'est inadmissible», a dit M. Taillon. «On a beau parler de baisses de taxes, on sait que la dette est une véritable taxe reportée. C'est une taxe que l'on reporte sur les générations futures.»
«Nous allons faire des baisses d'impôt une première priorité à l'ADQ quand notre marge de manoeuvre nous [permettra] de la faire», a ajouté M. Taillon.
Mais cette allergie aux baisses d'impôt immédiates de la part d'un parti qui dit représenter la classe moyenne a servi de munitions hier au premier ministre lors de la période de questions à l'Assemblée nationale. «La vraie question à partir de demain, c'est: qui parle au nom de la classe moyenne? Qui défend la classe moyenne au Québec? Qui va défendre les baisses d'impôt? C'est le Parti libéral du Québec qui va le faire», a lancé Jean Charest, alors que plusieurs députés adéquistes, grimaçant ou se tortillant, cachaient mal leur malaise. La ligne de parti est plus facile à tenir à cinq élus qu'à 41.
Les deux premières exigences adéquistes, c'est donc d'éliminer l'impasse budgétaire et d'éviter l'augmentation de la dette. En outre, l'équilibre financier doit être atteint en respectant les principes comptables généralement reconnus, comme l'exige le Vérificateur général. Il faut donc inclure les déficits des hôpitaux et des universités dans le cadre financier du gouvernement et mettre fin à la «comptabilité créative» qui fait passer a posteriori des dépenses courantes à la dette, a souligné M. Taillon. Enfin, l'ADQ insiste sur une politique tarifaire «responsable».
De son côté, en fin d'après-midi, la ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget, s'est prêtée à la traditionnelle séance de photographie, à la veille de la présentation du budget.
Elle s'est engagée à présenter «un budget équilibré, qui prend en considération tous les volets de la société», a-t-elle dit aux représentants des médias, en exhibant une nouvelle paire de chaussures, comme le veut la tradition.
Quant à savoir dans quelle mesure elle a tenu compte des conditions fixées par les partis d'opposition au moment de rédiger son document, Mme Jérôme-Forget, sibylline, s'est contentée de dire que son budget refléterait «les aspirations de l'ensemble des Québécois».
«Monique est contente», a-t-elle ajouté, en précisant que le document présenté aujourd'hui correspondait aux priorités du gouvernement.
Comme il est évident que l'adhésion de l'opposition officielle au budget n'est pas acquise, les députés péquistes du deuxième groupe d'opposition tiennent le sort du gouvernement entre leurs mains. Mais hier, le chef de son aile parlementaire, François Gendron, reflétant les discussions qui ont eu lieu entre Mme Jérôme-Forget et le porte-parole péquiste en matière de finances, François Legault, a énoncé les exigences somme toute modestes de son parti. «Est-ce que le premier ministre peut au moins garantir aux membres de cette Assemblée que de l'argent neuf sera investi en éducation, plus particulièrement pour les élèves en difficulté d'apprentissage, et en santé pour les soins à domicile?», a demandé M. Gendron. Il n'a pas obtenu de réponse sur-le-champ, mais on peut s'attendre à ce que la ministre des Finances ait justement prévu dans son budget des sommes pour ces deux demandes péquistes, qui s'inscrivent d'ailleurs dans les plans du gouvernement.
Le Devoir
Avec la Presse canadienne
Un budget sans risque pour les libéraux
Le gouvernement Charest pourra se passer de l'appui de l'ADQ
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