Un autre Suroît?

Rabaska


Depuis que le Bureau d'audiences publiques en environnement et son équivalent fédéral ont donné leur aval au projet de construction d'un port méthanier à Lévis, près de Québec, les opposants au projet annoncent «un nouveau Suroît», signifiant par là que comme dans ce projet de centrale au gaz, l'opinion publique forcera le gouvernement Charest à reculer.


Il est loin d'être certain qu'une telle mobilisation se produira. En tout cas, ce ne serait certainement pas justifié. Contrairement au Suroît, le projet (baptisé Rabaska) aurait un impact minime sur les émissions de gaz à effet de serre au Québec et positif sur le bilan de l'Ontario et de l'est des États-Unis. Globalement donc, l'environnement serait gagnant. Car ici, il ne s'agirait pas de produire avec du gaz de l'électricité que le Québec peut obtenir en harnachant ses rivières, mais de remplacer des carburants plus polluants - mazout, charbon - par un autre qui l'est beaucoup moins, le gaz naturel.
Le dossier Rabaska a fait couler beaucoup d'encre dans la région de Québec, mais reste relativement peu connu à Montréal. Rappelons brièvement de quoi il s'agit: la construction, dans le bras du fleuve Saint-Laurent situé entre Lévis et l'île d'Orléans, d'un terminal destiné à recevoir des navires transportant du gaz naturel liquéfié (GNL). Le gaz liquide serait transporté par conduites souterraines vers deux grands réservoirs, puis regazéifié pour être acheminé au gazoduc alimentant le Québec en gaz naturel. Avec l'autre terminal méthanier, dont la construction est prévue près de Rivière-du-Loup, le projet permettrait de diversifier les sources d'approvisionnement du Québec en gaz naturel, une diversification cruciale alors que les gisements de l'Ouest canadien ne suffiront bientôt plus à la demande.
L'avis favorable rendu par le BAPE a mis les opposants en colère. Ceux-ci sont allés jusqu'à remettre en question la compétence et l'indépendance des commissaires. Voilà qui est fort étonnant. Depuis des années, les écologistes se sont appuyés sur les travaux du BAPE pour s'opposer à toutes sortes de projets. Or, dès que l'organisme rend une décision qui ne fait pas leur affaire, ils dénoncent les commissaires et pressent Québec de ne pas tenir compte de leurs conclusions! Pourtant, les commissaires qui se sont penchés sur Rabaska comptent de longues années d'expérience en environnement et en consultation publique, notamment au BAPE.
Les adversaires du projet invoquent pour l'essentiel trois arguments. D'abord, ils craignent qu'un accident ne se produise, accident qui selon eux pourrait avoir des conséquences catastrophiques. Bien sûr, on peut toujours craindre le pire, mais comme l'a constaté le BAPE, le dossier du transport et du stockage du GNL depuis 40 ans ne révèle aucun accident grave.
Ensuite, les opposants estiment que le port méthanier défigurera la rive du Saint-Laurent à cet endroit, encore champêtre. Les commissaires leur ont donné raison sur ce point et demandent dans leur rapport que d'autres mesures d'atténuation soient prises. Il reste qu'à la lumière des simulations présentées par le promoteur, l'impact visuel sera faible. Soit dit en passant, les infrastructures dont il est question ici sont beaucoup moins imposantes que les éoliennes dont étaient entichés les écologistes jusqu'à récemment (i.e. jusqu'à ce qu'on commence à en construire).
Enfin, ceux qui sont contre Rabaska estiment que le Québec n'a pas à faire les frais de l'amélioration du bilan de GES de l'Ontario et des États-Unis. Le BAPE a rejeté cet argument bancal, qui fait mine d'ignorer que la lutte contre les changements climatiques est un défi planétaire et non local.
Si Rabaska a, en somme, peu de points communs avec le Suroît, il en a encore moins avec l'autre dossier où le gouvernement Charest a trébuché, celui du mont Orford. Autant ce dernier avait été bâclé, autant le projet de port méthanier a été minutieusement préparé par le consortium Gaz Métropolitain-Enbridge-Gaz de France. Le groupe a franchi jusqu'ici toutes les étapes imposées par les gouvernements. Il en reste encore deux: l'approbation de la Commission de protection du territoire agricole et celle de l'Office national de l'Énergie. Si les gouvernements devaient, après tout cela, dire non à Rabaska, les investisseurs comprendront qu'ici les lois, l'évaluation environnementale, les tribunaux administratifs, c'est de la frime. Qu'au Québec on est dans le monde de l'arbitraire politique total.

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André Pratte878 articles

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[une chronique intitulée « Tout est pourri » (critique de Anne-Marie Gingras) ->http://books.google.fr/books?id=EZWguAMXAtsC&pg=PA27-IA27&lpg=PA27-IA27&dq=pratte+Tout+est+pourri&source=bl&ots=MUti9NTQuH&sig=h2zgJlLgOg844j5ejxnUl4zH2_s&hl=fr&sa=X&ei=73RrT8aQEqnh0QHuh4GyBg&ved=0CEEQ6AEwBQ#v=onepage&q=pratte%20Tout%20est%20pourri&f=false]

[Semaine après semaine, ce petit monsieur nous convie à la petitesse->http://www.pierrefalardeau.com/index.php?option=com_content&task=view&id=30&Itemid=2]. Notre statut de minoritaires braillards, il le célèbre, en fait la promotion, le porte comme un étendard avec des trémolos orwelliens : « La dépendance, c’est l’indépendance ». « La soumission, c’est la liberté ». « La provincialisation, c’est la vraie souveraineté ». « La petitesse, c’est la grandeur ». Pour lui, un demi-strapontin à l’Unesco est une immense victoire pour notre peuple. C’est la seule politique étrangère qu’il arrive à imaginer pour le peuple québécois. Mais cet intellectuel colonisé type n’est pas seul. Power Corp. et Radio-Cadenas en engagent à la poche.





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