Rendre indépendant le gouvernement de nos élus (Québec), c’est bien mieux que d’avoir quelques-uns de nos élus dans celui des Anglos (Ottawa)
Ces jours-ci,[ les conservateurs, les libéraux, les néo-démocrates, bref tous les fédérâleux, y compris Mario Dumont, nous disent et nous répètent à satiété qu’il est de la plus haute importance pour notre peuple d’avoir des représentants, c’est-à-dire des élus, dans un conseil des ministres.->15449] Au fond, admettons-le, ils n’ont pas tout à fait tort. Mais, voilà, leur problème, c’est qu’ils s’arrêtent en chemin.
C’est vrai que, pour un peuple, il importe énormément d’avoir des élus dans un conseil des ministres. Toutefois, si les élus dudit peuple sont minoritaires au sein d’un gouvernement, cela ne donne pas grand-chose, aussi bien dire rien du tout : toute notre histoire en témoigne. Nos élus ont toujours été minoritaires au parlement et au gouvernement d’Ottawa, ils le seront toujours et, par conséquent, ils devront toujours s’incliner devant les élus de la majorité, c’est-à-dire de la majorité anglophone. Un peu coincés, nos fédérâleux rétorquent alors, pour nous consoler ou nous amadouer, que les élus de notre peuple sont majoritaires au parlement de Québec et contrôlent donc le gouvernement qui en émane. Certes, mais ce gouvernement, contrairement à celui d’Ottawa, n’a pas les pouvoirs ou prérogatives propres à un gouvernement indépendant, de sorte que notre peuple est ainsi privé de ce levier essentiel, un État libre, dont disposent, jouissent et bénéficient tant et tant d’autres peuples en ce monde. Il y a là, pour nous, une injustice fondamentale ainsi qu’un danger permanent et sans cesse croissant quant à notre existence, quant à notre survie même comme peuple, comme nation.
Alors, allons au bout du raisonnement de nos fédérâleux. Si, comme ils l’affirment eux-mêmes, il est dans l’intérêt d’un peuple d’avoir des élus au sein d’un gouvernement indépendant, il est encore bien plus dans son intérêt d’avoir à sa disposition un gouvernement indépendant formé et contrôlé par ses élus, et non par les élus des autres. Pour notre peuple, ce gouvernement ne peut évidemment pas être celui d’Ottawa, où nos élus seront toujours minoritaires, ce ne peut être que celui de Québec, qu’il s’agit donc de doter de tous les pouvoirs propres aux États membres des Nations unies.
Je sais, je sais, lectrices et lecteurs de Vigile, je ne vous apprends absolument rien, cet argument-là, « minoritaires à Ottawa, majoritaires à Québec », ne date pas d’hier. Il remonte au temps du RIN et nous le connaissons très bien. Inutile, direz-vous, de le ressasser encore de nos jours. Eh bien non, au contraire, je crois que tant que l’indépendance ne sera pas chose faite, il faudra constamment le brandir, cet argument-là. Car s’il nous est très familier, à nous les indépendantistes convaincus, nous aurions, je dirais même nous avons tort, et bien tort, de croire qu’il l’est tout autant pour la masse de nos compatriotes. Pensez-vous vraiment que la voisine d’en face sait ce que le militant que vous êtes sait ? Que le beau-frère qui n’a pas fini son secondaire est aussi conscient que vous des données élémentaires de la condition historico-socio-géo-démographique de notre peuple et de ce que cette condition a de tragique ? Aussi ni l’un ni l’autre ne sont-ils à blâmer. Car, au fait, quelqu’un se rappelle-t-il de la dernière fois qu’un élu, un candidat ou un quelconque chef de file indépendantiste bien connu a eu recours à l’argument dont je parle, l’argument « minoritaires à Ottawa, majoritaires à Québec » ? Là encore, sauf rarissime exception, ça remonte au temps du RIN. Et pourtant, n’est-ce pas là l’un de nos arguments les plus fondamentaux et sans doute le plus susceptible d’être compris de tous nos les nôtres, quel que soit le niveau de conscience ou de culture politique de chacun ?
Luc Potvin
Verdun
Toute notre histoire en témoigne
Au fond, admettons-le, ils n’ont pas tout à fait tort. Mais, voilà, leur problème, c’est qu’ils s’arrêtent en chemin.
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