Certains sujets ne cessent de s’inviter dans les médias, mais on finit parfois par perdre le fil des enjeux au gré des articles. C’est avec un adverbe, « pourquoi », que des étudiants en journalisme de l’École des médias de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) ont tenté de bien expliquer différents sujets d’actualité. Le Devoir commence aujourd’hui la publication de trois reportages sur les questions de la nouvelle voix de la droite canadienne, de la médicalisation et des peuples isolés.
Les divergences conservatrices sont-elles un phénomène nouveau ?
En 1987, le Parti réformiste voyait le jour à la suite d’un mécontentement des provinces de l’Ouest à l’endroit du Parti progressiste-conservateur de Brian Mulroney. L’histoire des conservateurs canadiens est faite de l’éclatement et de la réunification de plusieurs mouvements politiques à travers les décennies. Mais en septembre dernier, un seul député, Maxime Bernier, a décidé de quitter le navire du PCC pour fonder sa propre formation, le Parti populaire du Canada (PPC).
Cela pourrait faire mal au Parti conservateur lors des élections fédérales de l’automne. « D’anciens réformistes s’identifient aux idées de Maxime Bernier, plus précisément dans l’Ouest canadien », explique Thierry Giasson, professeur de science politique à l’Université Laval. Ce dernier ne croit toutefois pas qu’on assistera à un « exode » du vote conservateur vers le jeune parti.
De son côté, Maxime Bernier estime que « le Parti libéral est devenu le nouveau NPD et que les conservateurs sont devenus un parti de centre pragmatique », le PPC serait donc le seul parti de droite au Canada.
Quels votes Maxime Bernier peut-il espérer rallier ?
Au-delà de sa base militante, le PPC se doit de trouver un moyen de convaincre les électeurs des autres familles politiques, s’il souhaite se tailler une place au Parlement en octobre 2019.
Maxime Bernier est convaincu qu’il peut aller chercher bien d’autres appuis au-delà de son ancienne famille politique. « Il y a des gens du NPD qui veulent me suivre parce qu’on va abolir le cartel de l’Union des producteurs agricoles [UPA] et cesser de subventionner les entreprises » tout en baissant leurs impôts, a-t-il déjà fait valoir.
Selon lui, plusieurs anciens électeurs libéraux se tourneront vers sa nouvelle formation politique, puisqu’ils sont à la recherche « d’un équilibre budgétaire et d’une diminution des taxes », deux éléments qu’a écartés jusqu’à présent le gouvernement de Justin Trudeau.
Qui plus est, Maxime Bernier s’appuie sur le fait que son parti « dit les choses qui doivent être dites ». Il espère ainsi rejoindre les 32 % de Canadiens qui ne se sont pas déplacés aux urnes aux dernières élections fédérales de 2015.
Une percée du libertarisme est-elle possible ?
Réduction des taxes et des taux d’imposition, abolition des subventions aux entreprises et réduction du seuil d’immigration à 250 000 par année, Maxime Bernier partage beaucoup de points communs avec le Parti libertarien du Canada.
Fondé en 1973, ce parti a récolté plus de 35 000 votes au dernier scrutin, le classant en sixième place, après le Parti vert. Son chef, Tim Moen, a souvent offert son poste à Maxime Bernier, mais le Beauceron a préféré poursuivre sa propre voie. Une décision judicieuse, selon Thierry Giasson, car le libertarisme « n’est pas une force qui occupe un espace important dans l’arène politique canadienne ».
L’immigration est-elle le cheval de bataille de Maxime Bernier ?
Selon la firme Léger, 45 % des Canadiens croient que les 310 000 immigrants accueillis au pays en 2018 représentent une proportion trop élevée. Abaisser le seuil d’immigration est justement l’un des engagements phares de Maxime Bernier. Le chef du PPC se targue d’avoir « des politiques qui sont basées sur des principes et des convictions clairs ».
Les électeurs « sont prêts à laisser tomber les vieux partis », selon Maxime Bernier. La CAQ s’est fait élire en promettant d’abaisser le seuil d’immigration, tout comme espère le faire Maxime Bernier aux prochaines élections fédérales, ce qui pourrait bien lui donner un avantage au Québec. Près des deux tiers de la population étaient en accord avec le parti de François Legault sur le fait de ralentir l’immigration, selon un sondage de la firme CROP mené en novembre pour le compte de Radio-Canada.