D’un air grave, les commentateurs qui s’intéressent à la course à la chefferie du PQ l’en conjurent: il doit en finir avec le «virage identitaire».
Les commentateurs l’ont décrété: les péquistes auraient le choix entre un souverainisme ouvert sur le monde et un souverainisme frileux, replié sur lui-même.
On a confondu ouverture à l’autre et reniement de soi
Il faudrait d’abord savoir de quoi on parle. L’histoire nous éclairera.
Tordeur idéologique
Traditionnellement, le PQ se voulait le défenseur de l’identité québécoise. Mais au lendemain du référendum, traumatisés par la déclaration maladroite de Jacques Parizeau sur le vote ethnique, les souverainistes ont entrepris d’aseptiser leur projet. Objectif: le conformer aux standards du multiculturalisme.
On a passé la souveraineté dans un tordeur idéologique. Les souverainistes, alors, ont démissionné sur le plan linguistique. Ils ont accepté la bilinguisation de Montréal en renonçant à renforcer la loi 101. Ils ont renoncé à ancrer leur projet dans l’histoire pour ne pas avoir l’air passéistes. C’est un peuple sans mémoire que l’on conviait à l’indépendance. On a confondu ouverture à l’autre et reniement de soi. Objectif: conjuguer souveraineté et multiculturalisme.
Mais surtout, ils censurèrent toute référence à la majorité francophone. Quiconque rappelait son importance était accusé de nationalisme «ethnique», terme codé pour accuser son prochain de xénophobie. On a plutôt valorisé un supposé nationalisme «civique» qui n’avait de nationalisme que le nom. Il s’agissait d’une philosophie aseptisée, désincarnée, réduisant le Québec à un territoire sans âme encadré par une charte des droits.
Sauf qu’il y a un petit problème: la réalité identitaire québécoise s’ancre d’abord dans la majorité historique francophone, qui n’est pas une communauté parmi d’autres. En 2006, la crise des accommodements raisonnables a frappé. Elle représentait la traduction québécoise de la crise mondialisée du multiculturalisme.
Les péquistes n’avaient rien d’autre à proposer à la majorité francophone que des leçons de morale et ridiculisaient son malaise identitaire. C’est à ce moment que l’ADQ a récupéré la question identitaire.
Renouer avec l’identité
Le PQ a alors compris une chose. Séparer la souveraineté de l’identité, cela consiste à détacher un projet de sa raison d’être. Le PQ a alors cherché à renouer avec l’identité, en proposant une citoyenneté québécoise, le renforcement de l’enseignement de l’histoire, et en mettant de l’avant une Charte de la laïcité respectueuse de notre patrimoine. Nouvel objectif: dégager le Québec du multiculturalisme canadien.
Les souverainistes étaient de retour. Ils auraient de bons jours et de mauvais jours. Mais ils étaient de nouveau sur la bonne voie. On aura beau nous faire croire que la Charte des valeurs a été désavouée par la population, le fait est qu’une claire majorité l’endossait. L’identité pouvait conduire à une renaissance souverainiste. Les gardiens de l’idéologie dominante ont paniqué. Pour vaincre les souverainistes, on hurlera à nouveau au racisme.
Certains souverainistes prirent peur. Ils sont animés par une étrange ambition: ils veulent recevoir les compliments des fédéralistes. Erreur! Méfiez-vous quand vos adversaires vous complimentent. C’est qu’ils vous croient inoffensifs. Inversement, s’ils vous insultent, c’est qu’ils voient en vous un danger pour l’unité canadienne.
Pour un souverainiste, c’est le compliment suprême.
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