Crise à Détroit - L'auto aux abois

Crise mondiale — crise financière

Après les établissements financiers, voilà que c'est au tour de l'industrie automobile, de GM à BMW en passant par Toyota, Renault et consorts, d'être confrontée à des défis sans précédent depuis l'invention du moteur à explosion. Aux États-Unis, les prêts gouvernementaux réclamés par les trois de Detroit sont le sujet d'une session spéciale du Congrès. En Europe, Mercedes et compagnie souhaitent un soutien analogue. Sans quoi, affirme-t-on, ce sera la faillite.
Lors de leur comparution devant les membres du Congrès, les grands patrons de GM, Ford et Chrysler ont martelé que, sans secours financier de l'État, ils fermeraient boutique au cours des prochains mois. Dans un cas, celui de Chrysler, on a appris que la santé comptable de la compagnie étant pitoyable, la mise à mort de l'entreprise pourrait être ordonnée à très court terme. Bon. Pour faire court, si les élus n'accordent pas un soutien de 25 milliards avant Noël, alors ce sera... bonjour les dégâts. Et ce, d'ici au printemps prochain.
Les trois de Detroit ont pour eux des arguments de poids. Un, ils estiment inutile de se mettre sous la protection de la loi de la faillite pour la bonne et simple raison que le consommateur ne déboursera pas 20 000 $ et plus pour l'achat d'une automobile mise en marché par un constructeur en situation de... faillite. Tout logiquement, il craindrait que la garantie inhérente à un véhicule neuf ne soit réduite à la poudre de perlimpinpin. Bref, à trois fois rien.
Deux, les présidents de GM et autres ont décliné une litanie de gros chiffres. Sans aide du fédéral, des millions de personnes seraient condamnées au chômage tant aux États-Unis qu'au Canada. Selon la firme IHS Global Insight, la bagatelle de 200 milliards de taxes échapperait au même État sans parler des États et des municipalités. En clair, si les trois bouclent les livres, une cascade de faillites s'ensuivra d'un océan à l'autre.
Si les démocrates favorisent l'option voulant que les 25 milliards soient alloués rapido presto, voire militent avec force pour cela, les républicains, et surtout la Maison-Blanche, n'entendent pas épauler une industrie qu'ils jugent moribonde et donc vouée tôt ou tard à être mise en bière. Pour Bush et le secrétaire au Trésor, Henry Paulson, les 700 milliards dans lesquels les démocrates voudraient puiser les 25 milliards ont été débloqués pour les besoins des banques et strictement elles. Au Canada, c'est à retenir, le ministre de l'Industrie, Tony Clement, étudie la possibilité de participer au plan concocté par les démocrates.
En Europe, les constructeurs également frappent aux portes des États, et plus particulièrement en Allemagne, où ce secteur d'activité occupe une place prépondérante d'autant plus marquée qu'il symbolise à bien des égards le renouveau allemand d'après-guerre. Opel, au premier chef, a demandé un prêt de trois milliards. Il faut savoir qu'Opel étant une filiale de GM bien des élus hésitent à lui donner satisfaction. Sinon? Mercedes, Volkswagen et compagnie jugent que si le gouvernement américain vole au secours de GM et autres, la chancelière Angela Merkel n'aura pas d'autre choix que de l'imiter, ne serait-ce que pour maintenir leur position concurrentielle.
Cela étant, les élections législatives devant avoir lieu d'ici quelques mois, les partis allemands alignent évidemment leur position en matière automobile en vue de ce scrutin. À preuve, la décision prise récemment par les cousins politiques des démocrates américains, soit les sociaux-démocrates qui font partie, ne l'oublions pas, de la coalition actuellement au pouvoir. Toujours est-il qu'ils se sont opposés à l'exonération fiscale sur les automobiles achetées au cours de l'année proposée par Merkel. Leur argument? Cette politique est totalement contraire à nos objectifs environnementaux.
En attendant la suite, une chose est certaine: au cours des derniers mois, tous les constructeurs de la planète ont encaissé des diminutions de ventes telles qu'elles relèvent du carnage. Rien de moins. Les baisses enregistrées par GM, Ford, Chrysler mais aussi par Toyota, Nissan, Honda, Hyundai, Renault, Mercedes, BMW et d'autres que l'on oublie sont de l'ordre du quart ou 25 %. Dans certains cas, c'est pire. À l'évidence, les coûts économiques et sociaux conséquents à d'éventuelles faillites sont tels qu'ils commandent un soutien des États, mais un soutien conditionnel à une restructuration industrielle en phase avec la réalité écologique du monde, un soutien interdisant les parachutes dorés et primes accordés à une bande d'incompétents, comme on l'a observé au cours des vingt dernières années.


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