WASHINGTON | À neuf mois de la présidentielle américaine, Donald Trump a vanté mardi ses promesses «tenues» et une économie «rugissante» devant le Congrès des États-Unis au grand complet, sans dire un mot de son procès en destitution à la veille d’un acquittement quasi-certain.
La division qui règne dans la classe politique comme dans le pays était palpable lors du traditionnel discours sur l’état de l’Union : le président des États-Unis a ostensiblement évité de serrer la main que lui tendait la cheffe démocrate de la Chambre des représentants Nancy Pelosi. Et cette dernière, une fois l’allocution finie, a déchiré dans un geste spectaculaire sa copie du discours.
«Contrairement à tant d’autres avant moi, je tiens mes promesses», a lancé Donald Trump, sans cesse coupé par les ovations debout et les «É.-U., USA» des républicains, tandis que dans l’autre moitié de l’hémicycle, l’opposition démocrate restait assise et le plus souvent de marbre.
Donald Trump traverse une bonne période : l’acquittement qui se profile mercredi par le Sénat marquera l’épilogue d’une procédure de destitution de cinq mois qui n’a pas fait vaciller une base électorale toujours fidèle.
Mieux, selon le dernier sondage de l’institut Gallup, le milliardaire républicain enregistre 49 % d’opinions favorables, son score le plus élevé depuis son installation dans le Bureau ovale en janvier 2017.
«Grande réussite économique»
Cerise sur le gâteau : les primaires démocrates pour lui désigner un adversaire ont débuté lundi dans l’Iowa par un retentissant fiasco.
Dans cette même Chambre des représentants qui l’a mis en accusation pour «abus de pouvoir» et «entrave à la bonne marche du Congrès», il a donc brassé tous les thèmes de la campagne à venir pour le scrutin du 3 novembre : son «mur puissant» contre l’immigration venue du Mexique, son intention d’interdire l’avortement «tardif», et les accusations contre les candidats démocrates qui prônent selon lui une «mainmise socialiste sur notre système de santé».
Mais c’est surtout sur «la grande réussite économique» des États-Unis et le «boom des cols bleus» qu’il a mis l’accent, lors d’un discours sans annonce ni surprise. «Notre stratégie a marché», a-t-il martelé, en évoquant ses récents accords commerciaux avec la Chine, le Canada et le Mexique.
Le président a aussi défendu sa politique étrangère, à l’instar de son soutien à l’opposant vénézuélien Juan Guaido, un de ses invités au Congrès, contre le «dictateur socialiste» Nicolas Maduro dont il a promis de «briser» la «tyrannie».
Il est passé rapidement sur sa confrontation avec l’Iran et son plan de paix israélo-palestinien, avant de réaffirmer son intention de «ramener à la maison» à terme les soldats américains d’Afghanistan où, a-t-il dit, ils n’ont pas vocation à assurer le «maintien de l’ordre pour d’autres pays».
Dernier clin d’œil à son camp, Donald Trump a enfin annoncé que Rush Limbaugh, animateur radio et figure de la sphère conservatrice qui vient de révéler qu’il souffrait d’un cancer du poumon, recevrait la «médaille de la Liberté». Elle lui a été remise, sous des applaudissements nourris, par la Première dame Melania Trump.
Boycottage d’élus démocrates
À aucun moment, l’«impeachment» n’aura donc été évoqué. Le président, que de nombreux républicains invitaient à tourner vite la page, a donc fait profil bas sur ce point comme son lointain prédécesseur démocrate Bill Clinton lors de son grand discours annuel en 1999.
Mais l’ombre du procès, qui a marqué une rupture définitive entre les trumpistes et les démocrates, planait sur l’hémicycle.
Les élus de l’opposition se sont le plus souvent abstenus d’applaudir, alors que les précédents discours sur l’état de l’Union ont pu être scandés par davantage de parenthèses consensuelles.
Alexandria Ocasio-Cortez, benjamine du Congrès et figure montante de la gauche démocrate, fait partie des élus qui ont boycotté ce rendez-vous institutionnel pour ne pas «légitimer» un président qui ne respecte selon elle ni les lois ni la Constitution. D’autres sont partis en plein milieu, dénonçant ses «mensonges».
Les démocrates réclament la destitution du 45e président des États-Unis pour avoir essayé de forcer l’Ukraine à «salir» son possible adversaire à la présidentielle Joe Biden, notamment en gelant une aide militaire cruciale pour ce pays en guerre.
Mis en accusation mi-décembre par la Chambre des représentants, dominée par les démocrates, Donald Trump sait pouvoir compter mercredi sur le soutien de la quasi-totalité des 53 sénateurs républicains. Or la Constitution impose une majorité des deux tiers (67 sénateurs sur 100) pour le déclarer coupable.
Depuis que le scandale a éclaté, l’hôte de la Maison-Blanche se dit victime d’un coup monté orchestré par ses adversaires qui n’auraient pas digéré sa victoire-surprise de 2016. Lundi encore, il a dénoncé sur Twitter une «mascarade» ourdie par «les démocrates-qui-ne-font-rien».