La politique réserve toujours des surprises, même quand tout semble paisible. Prenez les libéraux fédéraux, par exemple. Réunis en congrès à Vancouver au cours du week-end, ils ont officiellement élu leur quatrième chef en un peu plus de cinq ans, ils ont retrouvé une rare harmonie et se sont convaincus que le pouvoir est maintenant à portée de main.
Tout ça pour réaliser que la suite des choses est maintenant entre les mains de... Jack Layton, le chef du Nouveau Parti démocratique.
Avec Michael Ignatieff solidement installé à la direction de leur parti, les libéraux veulent en découdre rapidement, idéalement à l'automne, avec les conservateurs de Stephen Harper.
Pas si vite! Le gouvernement minoritaire conservateur n'a besoin de l'appui que d'un seul parti pour survivre à un éventuel vote de confiance. Et comme les appuis au NPD baissent au même rythme que ceux des libéraux augmentent, il est loin d'être certain que M. Layton veuille repartir en campagne cette année.
À court terme, le sort des libéraux est donc entre les mains de leur ancien allié de coalition. Les libéraux se demandent aussi comment réagira Gilles Duceppe, dont les appuis sont aussi en baisse au Québec.
Michael Ignatieff n'a pas de pouvoir sur cette partie de l'équation. Pour la partie où il en a (sa propre formation politique), il peut toutefois dire mission accomplie au terme de ce congrès.
Voici, en vrac, quelques morceaux choisis de ce congrès de Vancouver.
Un très long jeudi soir...
Avant de couronner Michael Ignatieff, il fallait d'abord tourner la page sur l'ère Dion, un exercice long, pénible et douloureux, comme l'aura été le règne de l'ancien chef.
Une jeune observatrice perspicace a comparé la soirée d'adieu de vendredi au film Men in Black, dans lequel les deux agents secrets effacent la mémoire récente des témoins gênants à l'aide d'un flash lumineux dans les yeux.
Sauf que dans ce cas-ci, le flash a duré près de cinq heures, au cours d'une trop longue soirée.
Le tout avait bien commencé, avec un Jean Chrétien en feu qui a pourfendu Stephen Harper avec humour et fougue comme s'il était toujours chef du PLC.
La politique, c'est un don: certains l'ont, d'autres ne l'ont pas. Stéphane Dion, dans un interminable discours d'adieu, a rappelé aux militants libéraux qu'il fait partie de la deuxième catégorie.
D'entrée de jeu, on a reconnu son style grinçant quand il a déclaré, en parlant de John Turner et de lui-même: «Il y a de ces politiciens qui n'ont pas le bon timing...» Léger malaise dans la salle...
Au bout du compte, cette soirée s'est tellement étirée que l'invitée d'honneur, Louise Arbour, a pris la parole vers 23?h (2h du matin pour les gens de l'Est) devant environ 200 braves (sur plus de 2000) restés jusqu'à la fin.
La madame n'était pas contente du tout, avec raison, et elle l'a fait savoir aux organisateurs de la soirée.
Si les libéraux avaient encore un mince espoir de recruter Mme Arbour pour les prochaines élections, disons qu'ils n'ont pas aidé leur cause.
Le français, lointaine langue officielle
On s'inquiète beaucoup ces jours-ci de la place du français aux Jeux olympiques de Vancouver, l'hiver prochain.
Il faudrait aussi s'inquiéter du sort de la deuxième langue officielle du pays au sein du parti qui se vante pourtant de l'avoir élevée à ce statut.
À Montréal, en décembre 2006, le peu de place fait au français avait créé un malaise chez les libéraux. Cette fois, à Vancouver, personne n'a soulevé la question, mais Molière est aussi resté au vestiaire.
Dans tous les discours importants de la fin de semaine, le français a été relégué au titre de lointaine langue officielle.
Par ailleurs, les libéraux auraient intérêt à engager un correcteur pour nettoyer les innombrables fautes sur le site internet du PLC, où on encourage les militants à «nominer» Michael Ignatieff pour ne pas «perdre le momemtum»...
Oh well, plus ça change...
Amourettes libérales
Les libéraux de Michael Ignatieff sont en train de reconstruire des ponts avec leurs cousins québécois, notamment grâce à la présence de Marc-André Blanchard, libéral provincial influent et proche de Jean Charest, dans l'entourage du nouveau chef.
Cela dit, les libéraux provinciaux n'ont pas poussé l'amitié jusqu'à dépêcher des émissaires du gouvernement au congrès de Vancouver.
Les libéraux ontariens, toutefois, étaient omniprésents. À commencer par le premier ministre Dalton McGuinty, dont le frère, David, est député libéral fédéral dans une circonscription de la région d'Ottawa.
Dans un grand élan d'enthousiasme, Dalton McGuinty a même lancé: «Enfin, on aura un interlocuteur avec qui parler», en référence à Michael Ignatieff.
En plus du premier ministre, quelques membres du gouvernement ontarien étaient aussi présents, notamment le ministre de la Justice, Chris Bentley.
Les amourettes libérales risquent de déplaire fortement au premier ministre Harper, qui multiplie les annonces (pour sauver l'industrie automobile ontarienne, notamment) depuis quelques temps. La semaine dernière encore, il était en Ontario, avec Dalton McGuinty, pour lancer une bouée de sauvetage à Chrysler.
Bilan de congrès
Dans tous les discours importants de la fin de semaine, le français a été relégué au titre de lointaine langue officielle.
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