Hommage à madame Pauline Marois
18 avril 2014
Contre vents et marées...
On a oublié un peu trop vite que cette grande dame a failli payer de sa vie son engagement au Parti québécois. On a oublié un peu trop vite que lui fut dérobé ce soir-là un grand moment, la joie légitime d'être la première femme Première-ministre de l'histoire du Québec. On a oublié un peu trop vite que les Libéraux et les Caquistes se mirent aussitôt en mode électoral criard, promettant de défaire son gouvernement à la première occasion.
On a oublié un peu trop vite qu'elle régla la crise étudiante. On a oublié un peu trop vite qu'elle prenait les rênes d'un État pillé durant 9 ans. On a oublié un peu trop vite quelle voulait colmater une brèche dans ce qui restait de la Loi 101. On a oublié un peu trop vite quelle a légiféré dans le domaine des redevances minières. On a oublié un peu trop vite ses mesures pour contrer le financement illégal des partis.
On a oublié un peu trop vite qu'elle a eu le courage de mettre de l'avant la question fondamentale de la laïcité et neutralité de l'État. On a oublié un peu trop vite que son trop bref mandat fut ponctué d'attaques paternalistes des boys Parizeau-Landry-Bouchard-Duceppe scorant bêtement dans leurs propres buts.
On a oublié un peu trop vite que de tout temps, le 4e pouvoir, les mass-médias fédéralistes, soufflent des vents contraires. On a oublié un peu trop vite que le Québec est devenu ingouvernable et que des gens peu scrupuleux en profitent. On a oublié un peu trop vite qu'un rapport de force francophone ne peut reposer sur le multipartisme.
On a oublié un peu trop vite les acquis du féminisme, à en juger par les relents de misogynie présents jusque dans le langage populaire («LA» Marois). On a oublié un peu trop vite que le renforcement de l'affirmation du principe d'égalité homme/femme du projet de Charte aurait dû en temps normal récolter une adhésion généreuse.
On oublie un peu trop vite que la promotion de l'option indépendantiste est impossible dans le totalitarisme médiatique actuel et l'analphabétisme historique et politique d'un large segment de la population. On oublie à quel point le décalage entre le caractère intègre de Pauline Marois et le spectre étendu des mentalités de corruption généralisée furent en collision frontale. On oublie que Pauline Marois n'a pu disposer de la latitude d'un gouvernement majoritaire. On oublie que son règne ne fut qu'un blip, un incident de parcours pour les gros affairistes qui n'ont eu cesse de l'enfarger.
Au contraire de notre devise, on ne se souvient de rien, sinon que de ce qui fait bien notre affaire. Le Québec est devenu étouffant de petitesse et de mesquinerie.
Alors merci madame Marois, cette société à genoux n'est pas à la hauteur de vos larmes. Comme le Candide de Voltaire, il est à présent temps de cultiver votre jardin, puisque la réalité n'est pas à la hauteur du rêve.