Madame Marois, l’histoire vous ouvre sa porte !
4 septembre 2013
L'auteur nous invite à une re-définition des priorités.
Il faut rappeler que si le crucifix qui provoque le malaise de notre auteur est suspendu là où il est depuis 1936, personne, ou si peu, ne s'en formalisaient jusqu'ici. En tout cas, il n'a pas empêché la laïcisation graduelle qui s'est accélérée depuis les années 1960, si bien que la relation entre l'État et le citoyen est aujourd'hui essentiellement dépourvue de connotation religieuse.
L'auteur semble vouloir ignorer que l'acuité avec laquelle se pose aujourd'hui la question des valeurs communes n'a rien - ou si peu - à voir avec le crucifix mais avec une immigration massive qui amène sur notre sol des minorités, parmi des minorités, peu disposées à s'adapter au comportement de la majorité. Nous vivons depuis une décennie une recrudescence de demandes d'accommodements, sinon à leur mise en pratique délibérée dans l'espace public en vue d'en forcer l'acceptation par la majorité. Le débat actuel prend sa source dans cette réalité recomposée. Or, comme la doxa libérale de l'immigration massive semble impossible à remettre en cause dans un avenir prévisible, le gouvernement se croît justifié d'intervenir en amont en forçant l'harmonisation raisonnable des comportements publics.
Votre intervention s'écarte de ce constat, elle l'ignore, et redéfinit plutôt les termes en vue de cibler ostensiblement comme problème la présence purement symbolique du crucifix à l'AN.
Vous nous dites partager la «notion d'exception patrimoniale», j'aurais préféré que vous parliez d'avantage de droit que d'exception.
En fait, votre propos m'inquiète lorsque vous avancez que la préservation du patrimoine catholique, puisque c'est celui là que vous ciblez, aurait un caractère exceptionnel, et vous ajoutez :
«Dans un Québec officiellement laïque, je serai opposé à la disparition de tous les signes, les fêtes et les patronymes qui relèvent du patrimoine québécois.»
Vous êtes-vous mal exprimé ou pourriez-vous nous dire combien il resterait de ces signes à terme, si ils ne sont pas tous condamnés à la disparition ? Le patrimoine religieux historique de la nation fondatrice est forcément plus présent que tout autre, a-t-il simplement trop de poids à vos yeux pour qu'il soit tolérable ? Bref, je me demande si votre malaise ne vient pas tout simplement d'un refus d'embrasser la nation dont vous souhaitez la souveraineté dans sa dimension historique et ses prolongements?
Gilles Verrier